L’inspecteur sortit du bar enfumé, la tête embrumée par les vapeurs d’alcool. Il s’assit sur un banc à proximité et ferma les yeux un instant. La tiède obscurité de cette nuit et la demi-bouteille de whisky qu’il avait ingurgité pesaient sur ses épaules. Et son cerveau lui paraissait nager dans un marécage épais. Cette affaire de double homicide et de disparition l’obsédait. Il renifla l’air humide de cette soirée d’automne, palpant les senteurs enivrantes du chèvrefeuille qui masquaient les effluves d’urine et de cigarette consumée ; il se laissa un moment happé par le parfum d’une inconnue qui traversait la rue et s’étonna de percevoir l’aigreur de sa sueur par-delà le voile de la capiteuse fragrance où le jasmin prédominait.
Son entêtement à vouloir résoudre cette affaire non classée le transformait peu à peu, il le sentait. Il devenait plus solitaire encore, appréciait la nuit et sa population plus animale, plus instinctive ; il dormait la fenêtre ouverte, écoutant les murmures nocturnes, les feulements et aboiements, ces appels divins. Il aimait davantage les regards concupiscents de ses rencontres d’un soir, la bestialité des rapports, les corps à corps tumultueux, ponctués de grognements de satisfaction.
Il pensa à cette Magdalena. Il voulait la retrouver, lui apporter le coupable sur un plateau, et avec elle partager le festin… Il se pourlécha les babines. Se releva. Et continua son chemin, guidé par son instinct.
Et c’est ainsi que s’achève Zoon, nouvelle sur le thème des loups-garou. Ca vous la coupe, hein ? Bientôt vous pourrez retrouver cette nouvelle et 14 autres nouvelles dans ma prochaine anthologie, Chemins du possible chez Lulu et TheBookEdition…